Comme promis, voilà la suite de cette dégustation.
Partie 3 : Pannobile
« Pannobile » est le nom d’un mouvement initié en 1994 par 7 viticulteurs de Gols, rejoints par après par deux autres, de sorte qu’ils sont 9 domaines à être aujourd’hui partie prenante de celui-ci.
Le but est de constituer une plateforme où chacun des membres, tout en gardant sa totale indépendance, vient communiquer et partager ses idées et ses expériences dans l’optique d’élaborer ,
grâce à une sorte d’émulation mutuelle, des vins de haute qualité représentatifs de leur terroir et culture propres.
Le terme « Pannobile » est la contraction de « Pannonia », nom de la plaine déterminant les conditions climatiques de l’endroit, et de « nobile », rappelant leur objectif en matière de qualité.
Dans cette optique, chacun peut vinifier deux vins, un blanc et un rouge, portant ce label. Pour les rouges, seuls les cépages « locaux », blaufränkisch, zweigelt et saint laurent sont autorisés.
Les raisins doivent provenir exclusivement de parcelles bien déterminées sur les communes de Neusiedl, Weiden, Gols, Mönchhof et Halbturn.
Pannobile 2007 Gerhard Pittnauer (Neusiedlersee)
Zweigelt (en majorité), blaufränkisch et saint laurent. Origine : différentes parcelles sur le talus (Wagram) entre le plateau dominant le lac de Neusiedl à l’est (Parndorfer Platte) et les rives du lac lui-même.
Terres brunes, sédiments calcaires sur sables. Elevage en barriques pendant 15 mois. 24,00 EUR.
Bouquet encore très fermé dans un style plutôt végétal, empyreumatique (tabac blond) sur un fond de gelée de fruits noirs. L’entame est fine et douce au palais, avec de la rondeur et du volume.
Ensuite, ressort un fruit plutôt acidulé (groseille, airelle). C’est assez lissé, juteux, et d’une belle élégance. Elevage imperceptible. La longueur se marque sur le fruit avec toutefois un retour de tanins légèrement accrocheurs et un peu de verdeur à fondre.
Actuellement plus en finesse qu’en complexité avec une substance qui laisse augurer une bonne évolution dans le temps.
Pannobile 2000 Paul Achs (Neusiedlersee)
Zweigelt, saint laurent et blaufränkisch. Origine : différentes parcelles sur le talus (Wagram) entre le plateau dominant le lac de Neusiedl à l’est (Parndorfer Platte) et les rives du lac lui-même.
Terres brunes, sédiments calcaires sur sables. Elevage en barriques (dont 60 % neuves) pendant 15 mois. 24,50 EUR
La robe a toujours l’éclat rubis sombre de la jeunesse à peine altéré par une frange grenat au bord du disque. Le bouquet est résolument axé sur les petits fruits rouges et noirs avec une touche de pêche-abricot au vin, de chocolat noir amer et de noisette.
La bouche est fondue, fruitée, de grande élégance dans son demi-corps aux tanins soyeux. Peu de notes d’évolution. Longueur appréciable marquée par une acidité rémanente mais mûre qui donne du soutien et de la fraîcheur.
Très belle bouteille à l’avenir encore assuré.
Pannobile 1999 Anita & Hans Nittnaus (Neusiedlersee)
Zweigelt et blaufränkisch. Origine : différentes parcelles sur le talus (Wagram) entre le plateau dominant le lac de Neusiedl à l’est (Parndorfer Platte) et les rives du lac lui-même. Terres brunes, sédiments calcaires sur sables.
Elevage en barriques de 500 Litres pendant 18 mois. 22,00 EUR
Bouteille terminée le jour même… et donc pas de notes du lendemain pour moi.
Je cite donc le commentaire de Jean-Christophe auquel mon souvenir adhère totalement :
« Le sommet de la dégustation (pour moi) fut un Pannobile 1999 de Hans Nittnaus, tout en élégance et en finesse, sur des arômes évolués de vieux cuir, d'herbes aromatiques, avec toujours un beau fruit.
Un vin qui avait beaucoup d'allonge et de fraîcheur. Superbe et à point. »
Partie 4 - Pinots noirs
Pinot Noir 2007 Claus Preisinger (Neusiedlersee)
100% pinot noir. Origine : différentes parcelles fraîches et ventilées sur le Parndorfer Platte (Holzacker, Herrenwald, Breitenteilacker) plus une petite partie (parcelles plus chaudes) sur le talus (Spiegel, Salzberg).
Terres brunes, sédiments calcaires. Elevage en barriques. 29,50 EUR
La robe est plus jeune que le Siglos de Gesellmann et aussi plus soutenue. Le bouquet est d’une grande finesse avec beaucoup de fruit (framboise, fruits des bois), légèrement mentholé et vanillé, avec des notes de baies de genévrier un peu plus sauvages.
La bouche montre un beau volume, c’est rond, assez gras, plein de fruit. Les tanins sont finement ciselés. Matière étoffée, élégante, même si le vin s’exprime plus en puissance qu’en délicatesse.
Finale très persistante, réglissée et chocolatée. Une très belle bouteille en devenir qui a de la classe. Un peu dans le style d’un Clos Saint Jacques de Bruno Clair.
Pinot Noir Grand Select 1999 Wieninger (Wien)
100% blauburgunder. Origine : coteaux au nord-ouest de Vienne. Loess sur calcaire dolomitique. Elevage de mois en barriques (la moitié neuves). 32,75 EUR.
Bouteille décevante (saveurs déstructurées, raideur, arômes fluets) qui n’est pas à son niveau. Echantillon défectueux ou apogée dépassée ? Pas évident de trancher, on verra sur un autre échantillon. Dommage.
Partie 5 - Cuvées haut de gamme
Rot 2003 Schwarz - The Butcher - (Neusiedlersee)
100% zweigelt. Origine : parcelles sablo-graveleuses en bordure du lac de Neusiedl. Elevage en barriques. 45,00 EUR.
Vin noir jusqu’au bord du disque. Bouquet très mûr sur la crème de cassis et la confiture de fruit noir. On perçoit également d’étonnantes touches florales mais aussi des notes de bouillon de légume qu’on attendrait plutôt
dans une banale syrah australienne de Barossa Valley. La bouche est puissante, fondue, confiturée, de grande concentration mais sans beaucoup de complexité à ce stade.
En revanche, le vin conserve beaucoup de fraîcheur malgré son côté un peu surmaturé. Finale originale sur l’eau de rose et la violette.
Vin de caractère, assez déconcertant, étonnamment digeste malgré ses atours « nouveau monde ». Ce soir, je n’accroche pas sur ce millésime. A revoir dans quelques années.
Comondor 2006 Anita & Hans Nittnaus (Neusiedlersee)
55% merlot, 25% zweigelt et 20% blaufränkisch. Origine : le merlot vient du Kurzberg de Mönchhof et le blaufränkisch de l’Ungerberg de Gols sur des sols sablo-limoneux en bas du talus de la Parndorfer Platte.
Le zweigelt provient de parcelles sises à Greiner au pied des Leithagebirge au nord du lac sur des sols également de type limoneux mais plus calcaires. Elevage en fûts neufs de 500 L pendant 18 mois. 36,00 EUR.
Le nez demeure assez réservé oscillant entre un côté torréfié / végétal empyreumatique (café, thé noir, herbes sèches, tabac, fumée) et un autre plus fruité (prunelle, griotte, cassis). Discret mais plutôt complexe.
L’attaque en bouche est volumineuse, dense et juteuse, solidement campée sur une structure de tanins mûrs et gras. La longue finale confirme cet échange structure / jus avec une perception des tanins un peu plus amère.
Grand vin qui doit prendre de la bouteille pour s’amabiliser et se rendre plus sexy.
Admiral 1999 Pöckl (Neusiedlersee)
70% zweigelt, 15% blaufränkisch et 15% cabernet sauvignon. Origine : différentes parcelles sur le talus (Wagram) entre le plateau dominant le lac de Neusiedl à l’est (Parndorfer Platte) et les rives du lac lui-même.
Terres brunes, sédiments calcaires sur sables, limons profonds, graves. Elevage en barriques neuves pendant 22 mois. 34,50 EUR
Le bouquet est franchement torréfié / épicé (café, chicorée, clou de girofle, macis) et masque un peu le fruit que l’on pressent derrière. On retrouve ces notes d’élevage en bouche ce qui n’empêche pas que ce vin au demi-corps
manifeste élégance et finesse avec une matière fondue et assez juteuse malgré une pointe d’amertume en finale. Equilibre global superbe et grande longueur. Encore très jeune d’aspect.
On peut constater une certaine parenté de style avec le Pannobile de Nittnaus mais avec plus de substance et moins de subtilité que celui-ci en l’état actuel.
Gabarinza 1999 Gernot Heinrich (Neusiedlersee)
Zweigelt (en majorité), blaufränkisch, merlot et saint-laurent. Origine : ried Gabarinza de Gols. Sédiments et terres brunes peu caillouteuses, mais très calcaires. Elevage de 20 mois en fûts neufs de 500 L. 36,00 EUR
Encore une bouteille éclusée lors de la dégustation et c’est normal car ce vin a largement dominé les débats. Autant les précédents frappaient davantage les esprits par leur élevage soigné mais pas dominant,
autant le Gabarinza présente un fruit ample et éclatant malgré ses 10 ans d’âge et, surtout, un côté diablement séducteur qui emporte immédiatement l’adhésion.
A nouveau, Jean-Christophe a bien synthétisé les choses : « L'apothéose de la soirée fut le Gabarinza 1999 de Heinrich: disque tuilé, fruit énorme et début d'aromes tertiaires. Attaque nette, superbe ampleur en milieu de bouche, finale acidulée et épicée. Wow! »
Coup de cœur pour moi également.
La dégustation a permis de balayer, de manière succincte, toute la diversité des vins rouges autrichiens. L'ensemble des participants était partagé entre deux sentiments :
la surprise et la reconnaissance (avec un enthousiasme pas si modéré) de la qualité globale des vins.
Pierre