Au cœur du Villa d'Este Wine Symposium 2018
Dégustation en semi aveugle de 10 cabernet sauvignon du monde
Thomas Mauss réitère cette année l'expérience qui avait si bien fonctionné l'an passé avec les syrah et qui consistait en une dégustation en semi aveugle où les vins nous sont connus mais pas leur ordre de service.
Le caractère pédagogique d'un tel moment est remarquablement intéressant pour peu qu'on s'y essaie avec franchise et honnêteté car elle oblige le dégustateur à se confronter à ses propres a priori sur des régions viticoles qui lui sont, en tout cas dans mon cas, la plupart du temps inconnues.
Ajoutez mon ignorance remarquable en ce qui concerne les cépages bordelais et vous comprendrez que je n'en menais pas si large au moment d'essayer de jouer aux madames Irma de palace...
Nous est demandé d'attribuer un podium à nos trois vins préférés.
Afin de corser un peu l'exercice et parce que poser son ego sur la table de dégustation fait partie du sel ludique qui condimente nombre de dégustations sur LPV, j'ajouterai donc mes tentatives de pronostics notées après chaque vin dégusté.
En piste !
1 -
Weingut Kollwentz - Cabernet Sauvignon 2002 (Autriche)
Robe grenat pourpre sans réelle évolution.
Nez sur un léger végétal, sur la feuille de cassis plus que le fruit lui-même, des senteurs épicées et finement grillées, presque sur la résine.
Bouche assez ferme, sur une jolie attaque froide mais qui manque de volume et de chair pour se relancer vraiment.
Des goûts légèrement terreux abiment un fruit marqué d'un léger végétal.
La finale reste ferme et marquée d'une acidité haute.
Un peu trop sévère.
Aucun doute, on est au nord.
Autriche ou Allemagne ?
2 -
Domaine de Baal 2009 (Liban)
Robe noire.
Nez moche, sur le pneu et le caramel qui masquent des senteurs riches de pâte de fruits noirs.
Bouche puissante, à la fois massive en sucrosité comme en acidité, avec un côté confit très présent.
Les tanins imposants mais pas secs ont l'avantage de faire saliver et de mobiliser un peu cette masse.
Les goûts sont moins boisés que les senteurs du nez ne pouvaient le laisser craindre, sur les fruits rouges confits.
Finale brute aux tanins féroces mais dotée d'une certaine présence.
L'anti vin de pdf par excellent mais pas mal fait si n'était ce nez affreux.
Aucune doute, on est au Sud.
Argentine ?
3 -
Château Margaux 2004 (France)
Robe pourpre assez légère, avec une petite évolution claire sur l'extérieur du disque.
Nez froid et austère, sur un côté légèrement viscéral et phénolé qui tire sur le poivronneux.
Attaque de bouche tranchante, sur une acidité haute mais dont la fraîcheur confine à la maigreur par manque de volume pour relancer une matière faiblarde.
Les tanins sont correctement intégrés mais l'acidité et des goûts à l'ancienne, avec une pointe animale, n'apportent que peu de plaisir.
Finale ferme et sévère, mordante d'acidité et avec une certaine amertume qui signe le manque de maturité selon moi.
Pas de plaisir possible.
J'hésite entre France et Autriche pour le côté très froid. Le nez fait méchamment bordelais old school mais di djiou, un premier ne peut pas sortir une bouche pareille à un tel prix ?!
Allez, je me mouille quand même en restant sur ma première impression : Château Margaux ?
4 -
Errazuriz - Don Maximiano 2007 (Chili)
Robe violacée impénétrable.
Nez monolithique et un peu vulgaire, terriblement marqué par du cassis, du cassis et encore du cassis. Pointe derrière le Lejay-Lagoute une touche de caramel qui n'arrange pas le tableau selon mes goûts.
Bouche beaucoup trop riche à mon palais, avec une sucrosité lourde, un effet pâte de fruits noirs malgré la présence d'une acidité haute et de tannins puissants qui essaient de mobiliser l'ensemble.
Mais les goûts bien trop axés sur le confit de fruit et la finale d'une largeur excessive épuisent toute buvabilité pour moi.
Curieuse impression de ne pas avoir les codes pour apprécier ce type de mammouth fruité.
Un vin qui peut plaire à des palais moins fragiles que le mien.
USA ?
5 -
Laurel Glen - Cabernet Sauvignon 2008 (USA)
Robe bordeaux sombre.
Nez concentré, posé, riche mais pas vulgaire, sur de belles notes de fruits noirs frais enroulés dans le chocolat blanc.
Bouche puissante, d'une certaine largeur par sa sucrosité et ses tannins présents mais en aucun cas caricaturale.
L'ensemble est généreux mais reste équilibré, sur de beaux goûts de fruits noirs mentholés.
Finale resserrée autour d'une amertume qui prend le pas sur une douceur un peu dissociée.
Trop puissant pour moi mais plutôt bien fait.
Chili ?
6 -
Weingut Knipser - Cabernet Sauvignon 2003 (Allemagne)
Robe bordeaux violacé, sans réelle évolution.
Nez sérieux et un peu vampirisé par un élevage fumé / pain grillé très présent et qui pèse sur un joli ensemble de fruits noirs épicés.
La bouche est très bien équilibrée, avec une classe certaine, sur une belle matière pleine portée par une trame acide sans faiblesse. Le vin est structuré et frais, sur un corps bien balancé qui concilie très bien volume et fraîcheur.
Finale franche, avec de l'allonge et qui s'ouvre sur des goûts encore frais très agréables.
Très bien.
Mince, ça fait quand même pas sud, ça.
Donc Autriche ou Allemagne ?
7 -
Shabo Wines - Cabernet Sauvignon Reserve 2014 (Ukraine)
Robe violacée sombre.
Nez mal élevé, sur d'affreuses notes lactées et fromagères qui écrasent de minces senteurs de fruits noirs.
Bouche déséquilibrée, sur une sucrosité de bois et des goûts beurrés affreux.
Finale sucrailleuse et amère.
Affreux.
Liban ? Ukraine ?
8 -
Catena Zapata - Nicolas Catena Zapata 2006 (Argentine)
Robe bordeaux sombre, sur une petite évolution marron.
Nez évolué, sur les épices, une pointe caramélisée, avec un côté un peu vieillot éventé.
Bouche bancale et fuyante, sans trame avec un côté sucré amer assez désagréable qui manque de définition et de lisibilité aromatique.
Fort curieusement, la finale se recentre autour d'une acidité pointue qui lui apporte de l'allonge.
Je n'ai rien compris à ce vin !
??
9 -
Anthonij Ruppert - Cabernet Sauvignon 2008 (Afrique du Sud)
Robe violet pourpre.
Nez mentholé, sur l'eucalyptus, avec un étonnant côté infusion, bouillon de légumes racines, sur le panais.
Bouche avec de la richesse mais dont le soleil est bien tempéré par un côté frais, quand un joli volume délié est porté par une aromatique mentholée et une acidité bien intégrée qui apporte de la fraîcheur.
Le vin possède une bonne capacité de relance par son acidité et ses beaux tanins francs.
Finale agréable pas interminable, sur des goûts de boîte à épices.
Pas mal du tout.
Je mise sur le Sud Africain
10 -
Castello del Terriccio - Lupicaia 2007 (Italie)
Robe assez claire, grenat léger.
Nez un peu lacté, sur des notes de cassis frais légères.
Bouche pas en place, sur un côté acide amer un peu forcé et de légers goûts de caramel au lait qui manquent de naturel.
Finale un peu amère et asséchante.
Aucun plaisir pour moi.
??
Ben les copains, avec des résultats pareils, c'est pas encore demain que je vais pouvoir lutter avec mon Gunthard champion de France de dégustation...
Mes favoris
1- Knipser
2- Anthonij Ruppert
3- Laurel Glen
Les favoris de l'assistance
1- Lupicaia
2- Knipser
3- Margaux
Je conserverai néanmoins de cette dégustation un certain soulagement face à une affection qui semble tout de même patente pour les vins septentrionaux...
Ouf, pas de plaintes en vue dans l'autoroute entre les neurones qui relient mon cerveau de fillette au palais du même type.
Et c'est tout de même rassurant pour l'équilibre de ma cave. Imaginez l'angoisse si je me découvrais fan de malbec XXL et de condrieu sûrmuri à 50 ans ?!
Bon, c'est pas tout ça mais le temps passe vite quand on est pris par de si pieuses occupations.
C'est qu'il serait sage de pas trainer à débriefer avec les copains en mode sortie d'exam "et toi, t'as répondu quoi à la 4 ?" et d'aller se décrasser les entournures en passant le petit costume qui va bien !
A ce titre, je profite de l'occasion pour remercier chaleureusement les nombreux LPViens qui ont pris soin de s'inquiéter de la précieuse présence des serre-kikis de circonstance, outil indispensable à la sérénité du saint poseur au moment d'affronter le repas du soir.
Mais je vous cacherai pas que j'ai vérifié deux fois quand même avant de fermer la valise...
Oublier ses chaussettes ou son calcif, ça se camoulfe. Mais les chemises ou les cravates assorties, c'est déjà plus risqué...
C'est donc beau comme un Georges Cloonesque et l’appétit dans l'étalon que je rejoins d'un pas gourmand la troupe déjà groupée devant l'immense salle qui accueille dégustations et dîners pour la traditionnelle Paulée qui lance l'événement.
A suivre...
Oliv