Après avoir rencontré Claude, et entre nos visites de cavistes de cette ville pleine de charme qu'est Buenos Aires, nos sommes allés déjeuner ou dîner (c'est à choix en fonction de votre pays de résidence …. ici, on s'en fiche un peu car c'était 16.00 même si théoriquement ce n'était que le 2e repas du jour) …
Bu au cours du repas :
Conalbi Grinberg 1997 de Casa Vinicola, 100% Malbec
Un vin de petite production, mais de grand intérêt. En effet, c'est le 1er vin que je connais qui est issu de vignes de plus de 75 ans mais qui ne voit pas la barrique.
ROBE : violet
NEZ : un nez assez fin donnant sur le pruneau avec un volatile assez important. Petit à petit, un léger côté de vin muté fait son apparition et le fruit disparaît. Ce vin a, semble-t-il, passé sa maturité.
BOUCHE : au début, la matière est bien structurée et le tout est assez corsé. Puis, l'équilibre disparaît et un grand creux se fait sentir.
Ce vin est sur le déclin mais voilà un bon exemple de Malbec pour commencer la soirée.
23 :00, restaurant « Le Paté ».
Grande soirée de dégustation en cette nuit du 19 octobre. Thème particulier, endroit particulier, occasion particulière :
Une dégustation de grands Malbecs argentins, à Buenos Aires, en compagnie de Claude, alias Claudius, et de ses meilleurs amis !! Pouvais-je rêver de meilleure introduction à ce cépage, encore relativement méconnu au niveau international, mais pouvant produire de grands vins, comme j'ai pu le constater avec plaisir !!!
Claudius et Juan vont nous apporter leur contribution d'expert. Voici mes commentaires de « Malbec novice » …. et dans l'ordre croissant des vins dégustés :
El Felino 2000, de El Nativo Argentino, 100% Malbec, Mendoza. 13.5% alcool
Vin de style « garage » de petite production.
ROBE : de couleur violette
NEZ : ce vin a des arômes qui ont évolué en cours de soirée. Léger cassis pour commencer, puis évolution sur des notes plaisantes de sous-bois humide. Une bonne élégance.
BOUCHE : des saveurs de fruits rouges (groseille) et de cuir. Le passage en barrique me laisse une légère impression de bois. Les baies ont une bonne acidité, les tannins ne sont pas encore fondus mais l'ensemble est bien équilibré. Finale de bonne longueur.
Un vin élégant, sans dilution.
El Malbec 2000 de Ricardo Santos, 100% Malbec, Mendoza, 13.5% alcool
Ricardo Santos est l'ancien propriétaire de Norton et a maintenant fondé sa propre « bodega ».
ROBE : violet foncé
NEZ : malheureusement, le vin est bouchonné. Il nous a quand même fallu quelques 15 minutes pour confirmer qu'il s'agissait bien d'un goût de bouchon, et non d'une particularité de ce vin !!!
Sous le bouchon, on sent que ce vin a une belle matière.
BOUCHE : difficile de se faire une opinion, mais l'attaque est douce sans être confiturée. La matière se confirme. En bouche, ce nectar donne une impression d'être complet.
A réessayer dans un futur proche.
Duetto Malbec Oak 1997 de Casa Vinicola, 100% Malbec, 13.6% alcool
Un vin de petite production, issu de vignes de plus de 80 ans, peu connu.
ROBE : violet foncé. Elle ne montre pas de signe d'évolution.
NEZ : un nez fruité avec des notes de chocolat. Malheureusement, le vin dégage une odeur assez forte d'acétone, peut-être suite au changement de température subi dans la journée.
BOUCHE : une déception complète. Un trou d'air ….. aucun squelette, peu de matière et des tannins encore trop durs.
Le moins bon vin de la soirée en qualité pure, mais il a sûrement souffert du traitement.
Angel Pura Sangre 1999 de Angel Mendoza, Malbec – Cabernet Sauvignon, Mendoza, 13.8% alcool
ROBE : de couleur grenat-violette
NEZ : le Cabernet pointe son nez même si le Malbec prend le dessus. Pour la 1e fois de la soirée, on trouve cette forte présence de fruits rouges doublée d'une sensation piquante qui caractérise les Malbecs. Claude parlera d'une impression de mélisse …
BOUCHE : la matière n'est que peu présente et ce vin n'exhale aucune saveur bien particulière. Les 2 cépages ont donné l'impression de se neutraliser au lieu de se complémenter. A ce titre, le mélange Malbec – CS me paraît une mauvaise idée car les 2 ont cette tendance à donner un creux en milieu de bouche. Un mélange avec le Merlot aurait peut-être été plus judicieux.
Weinert Malbec Estrella 1977, 100% Malbec, Mendoza, 14.5% alcool
Oui, vous avez bien lu …. 1977 ….. et ceci n'est pas la seule particularité de ce vin car il a passé 15 ans en barriques françaises avent d'être mis en bouteille. Autant vous dire que nous sommes tous curieux d'ouvrir cette bouteille ….
ROBE : quel beau grenat ! Quelques reflets tuilés apparaissent lorsque l'on fait tourner le vin en verre mais sinon la robe ne fait pas son âge.
NEZ : des arômes volatils, un côté moutarde encore jamais rencontré dans un vin, puis des notes de goudron, de réglisse et un fumé des plus appréciables. Léger bémol « indépendant » de la qualité du vin : une petite senteur acétonée suite au maniement du vin lors de l'après-midi. Mais quel nez et quelle complexité.
BOUCHE : une bouche somptueuse tout en longueur. Les tannins ne sont pas encore fondus (je n'y reviens toujours pas …) mais son boisé est parfaitement intégré. Des arômes de cigare se font sentir en vin de bouteille, ce qui ne fait que rajouter à la profondeur de ce nectar.
Un grand plaisir et je me ferai un point d'honneur à racheter quelques bouteilles lors de mon prochain passage ….. J'ai appris une leçon importante avec ce vin : le Malbec peut être un cépage de garde quand il est bien vinifié !
Finca Los Nobles 1996 de Luigi Bosca, Malbec et Petite Verdot, Mendoza, 13.3% alcool
ROBE : grenat de forte intensité
NEZ : un nez typiquement Malbec, sur les fruits rouges et une volatilité importante. Mais un nez complexe et plein.
BOUCHE : des arômes floraux, un vin plein en bouche et une grande longueur. Le verdot se fait sentir et me donne une impression similaire au Cabernet Franc. Ces 2 cépages sont-ils si similaires ? Un grand vin, à trame fine et très noble. Il joue plus sur la finesse que sur la puissance.
Angelica Zapata 1997 de Catena Zapata, 100% Malbec, Mendoza, 13.8% alcool
Un vin que j'attendais avec impatience après les commentaires élogieux de Claude sur LPDV ….
ROBE : un grenat foncé de toute beauté
NEZ : grandiose …… je perds mes mots et me sens comme un petit poucet vis-a-vis de ce monument …. des notes de fruits rouges, de chocolat et bien plus. Un vin équilibré et complexe.
BOUCHE : ……… encore trop jeune. Ce vin tiendra la route jusqu'en 2010. Ah oui, la bouche …. longue, très très longue, Complète, Equilibrée. Ce grand cru me donne l'impression d'un rayon laser …. Je n'arrive pas à décrire mes impressions tellement je suis sous le choc et le charme de ce vin dont je ne connaissais que la réputation jusqu'à ce soir …
Cadus 1999 de Nieto Carbà³, 100% Malbec, Mendoza, 13.4% alcool
Ce Cadus a été nommé le plus grand vin du Nouveau-Monde – toutes catégories confondues – en 2001 par la revue Decanter.
ROBE : violet à noir
NEZ : excellent, mais à mon avis 1 ton en dessous du Zapata. Légèrement plus acide malgré un fruité de grande classe.
BOUCHE : les tannins se font naturellement sentir. Un vin d'un grand équilibre, complexe, mélangeant fruits rouges et réglisse.
Plus « flash » que le Zapata, il me semble ne pas avoir sa plénitude.
Ce vin est sensé réputé pour sa puissance à toute épreuve. Ce soir, il a montré un visage plus docile mais tout aussi plaisant.
Yacochuya 2000 de San Pedro de Yacochuya, 100% Malbec, Salta, 16% alcool
Le cru vinifié par Michel Rolland …. nous l'avons mis en dernier à cause de son degré alcoolique impressionant.
ROBE : noire …. black black black
NEZ : puissant et légèrement piquant. Des notes poivrées se font sentir, ainsi qu'un élevage de qualité, mais bien présent.
BOUCHE : une attaque douceatre, des tannins encore présents. Ce vin droit, franc et rigide demandera du temps pour se faire. L'impression alcoolique n'est pas trop forte malgré le fait qu'elle cache un peu, à mon avis, la complexité du tout. Ce vin est encore très acide.
Nous avons beaucoup débattu sur notre vin préféré. Assez vite, l'Angelica Zapata et le Cadus se sont profilés et nous en avons profité pour les comparer dans 2 verres différents. A mon avis, le Zapata a plus de profondeur. En mettant son nez en dessus su verre, on a l'impression que le bouquet provient du vin en entier, et ce par rapport au Cadus au l'explosivité donne le sentiment de provenir de la surface du liquide. Ces 2 vins sont très distincts et ont chacun leur charme.
Mais pour moi, le meilleur c'est l'Angelica Zapata. C'est un des 5 meilleurs vins que je n'ai jamais eu à déguster et je vous le dis directement : il vaut facilement un 2e G.C.C bordelais, voir un 1er ….
Mon classement final est le suivant :
1er : Angelica Zapata
2e : Cadus
3e : Yacochuya
4e : Weinert
5e : Luigi Bosa
6e : El Malbec de Ricardo Santos
7e : El Felino
8e : Pura Sangre
9e : Duetto
En plus d'avoir été un très grand moment de dégustation, je retiendrai cette soirée pour 3 raisons particulières : premièrement la rencontre d'un épicurien au nez fin, Claudius. Deuxièmement, pour la rencontre d'un palais de 1e classe, Juan.
Et troisièmement, pour ce qu'a réalisé le web pour beaucoup d'entre nous : apprendre et connaître de nouvelles sensations. Cet Angelica Zapata, Claudius en avait parlé en long et en large, comme beaucoup de nous de leur vin fétiche sur LPDV. Il m'a fallu un voyage, une rencontre et une soirée de haute voltige pour que cette icône devienne une révélation personnelle, et un souvenir vinicole que j'emporterai dans ma tombe.
Son prix ? Entre 22 et 25 US$ en fonction de la quantité achetée …. Qui partage une palette avec moi ?
Un grand merci au restaurant « Le Paté » pour nous avoir gentiment accueilli avec nos bouteilles et …. nos verres. Ils ont quand même écarquillé les yeux quand nous avons ouverts nos 2 cartons de verres Spiegelau …..
Hasta luego Buenos Aires !
Anthony