Maison Bollinger (juin 2005)
Christian Dennis nous sert tout d’abord de guide dans les 2 parcelles survivantes de pinot noir pré-phylloxérique, puis dans les caves et il clôt le parcours en animant la dégustation.
La célèbre maison d’Aÿ reste une des dernières familiale et indépendante.
Elle possède 160 Ha de vignes (dont 85% en grands et premiers crus) qui assurent 70% de sa production. Les 30% restants sont acquis via des achats de raisin principalement.
Les vignes sont principalement situées sur les communes de Aÿ, Mareuil-sur-Aÿ, Verzy, Verzenay, Louvois et Bouzy pour le pinot noir, sur Chamvoisy, Passy-Grigny et Epernay pour le pinot meunier et sur Cramant, Cuis, Vertus pour le chardonnay.
Sa production annuelle excède les 2 millions de bouteilles.
Ses différentes cuvées sont :
Spécial Cuvée : le BsA de la maison ; il est constitué à partir d’environ 2/3 de vin de l’année (le millésime de base), 1/3 de vin de l’année précédent et 5 à 10% de vins de réserve ; du point de vue des cépages, il contient 60% de pinot noir, 25% de chardonnay et 15% de pinot meunier,
Grande Année : le millésimé constitué à partir de 65% de pinot noir et 35% de chardonnay,
Grande Année Rosé : c’est une Grande Année à laquelle a été ajoutée 8 à 10% de pinot noir tranquille d’Aÿ,
R. D. : sigle pour Récemment Dégorgé ; c’est une Grande Année gardée sur lattes quelques années de plus et dégorgée tardivement au moment de la commercialisation,
Vieilles Vignes Françaises : un millésimé BdN constitué à partir de 2 parcelles de respectivement 24 et 21 ares de vignes franches de pied situées à Aÿ, conduites en foule et reproduites chaque année par provignage ; une 3ième parcelle située sur Bouzy a été arrachée en 2004 car subissant à nouveau les assauts du phylloxéra ; la densité des 2 parcelles rescapées est de 28000 pieds à l’Ha ; 2000 à 4000 bouteilles sont produites sur les millésimes retenus ; il est assez émouvant de se promener au milieu de ces tertres follement plantés de baguettes dont l’origine remonte au 19ième siècle,
La Côte aux Enfants : un Coteaux Champenois produit à partir de pinot noir d’Aÿ dont sont tirées environ 5000 bouteilles dans les bons millésimes.
Après le pressurage, seule la cuvée est conservée pour les vins.
Pour les vins millésimés, les vins de réserve et 20% du millésime de base entrant dans la composition du Spécial Cuvée, la première fermentation alcoolique et la fermentation malolactique se font dans des barriques de 4 ans minimum achetées en Bourgogne.
Les 80% restant du millésime de base entrant dans la composition du Spécial Cuvée sont fermentés en cuve inox.
Une tonnellerie maison prend en charge les réparations. Les barriques sont ainsi conservées jusqu’à la fin de leur vie.
Grande originalité de Bollinger, les vins de réserve sont conservés en magnum, au ¼ de pression et bouchés au liège afin d’éviter une oxydation prématurée, oxydation accentuée par une conservation sous capsule. Il y a en permanence un stock de 50 types différents de ces vins de réserve si l’on joue sur les communes, les cépages et les millésimes.
Les millésimés sont aussi conservés sur lattes sous bouchon de liège. Ils sont ainsi gardés 5 à 8 ans avant d’être remués manuellement sur pupitre, dégorgés et dosés.
Le Spécial Cuvée est lui bouché par une capsule, sa garde étant beaucoup plus réduite (3 ans sur lattes).
Le Spécial Cuvée, la Grande Année et la Grande Année Rosé sont dosés à 7/8 g/l, le RD et les Vieilles Vignes Françaises le sont à 3/4 g/l.
M. Dennis nous reçoit avec beaucoup d’intérêt. Les expressions sont de haute volée, plutôt hiératiques tout en restant pétries d’élégance, et placent d’emblée la barre très haut (le BsA pouvant rivaliser avec nombre de cuvées plus prestigieuses produites dans d’autres domaines).
Vins dégustés :
1.
Bollinger Spécial Cuvée :
JP16 - PP15,5/16 - LG16,5
On scrute ici une expression particulièrement odorante, dégageant des odeurs tout à fait mûres de brioche, d’agrumes, de fleurs blanches, de beurre de cacahuète. Effervescence brillante, fine, vertébrée, tamisée et complexe. Grande saveur de haut niveau pour cette entrée de gamme, puissante et fine à la fois, déjà cristalline (avec la grande cuvée de Krug en ligne de mire).
2.
Bollinger Grande Année 1997 :
JP17/17,5 - PP17 - LG17,5
7g de sucre résiduel. Le nez délicatement grillé est souligné de notes avantageuses : pêche jaune, framboise, citron, coquille d’huître. En bouche, le vin est éclatant, charnu et droit (minéralité, acidité). Allonge, pureté et fraîcheur qualifient cette cuvée qui implique logiquement plus de nuances que le BsA (elle est elle-même plus prête à boire que l’auguste Grande Année 1996).
3.
Bollinger RD 1995 :
JP18 – PP17,5 – LG17,5/18
Dégorgé le 21/2/05, avec 3g de sucre résiduel. Des senteurs mirifiques taquinent le nez : citron, pêche, sureau (végétal très frais), miel, brioche, curcuma, réglisse. Une très légère pointe animale complexifie l’ensemble. Bouche aristocratique (qualité et finesse de la bulle), fine, corsée, appétissante mais pas encore tout à fait fondue (le temps lui appartient). Un vin de repas pour dans 5 ans, à associer à un perdreau au chou selon notre hôte.
30/7/05 au celler de Can Roca à Gérone :
4.
Bollinger Vieilles Vignes Françaises 96 (18/20) : un champagne à la force vineuse impressionnante, encore si jeune, idéal à table. Proposé à 200 euros sur table, soit plus de fois moins cher que dans le commerce.