Pour un dîner en famille, j’ai pris en cave les champagnes qui pourraient accompagner foie gras et fromages et dans mon tour de cave, je repère deux demi-bouteilles de bourgognes tenues verticales dans la zone où je stocke les alcools. Les vins sont de 1945 et 1947, les niveaux ont l’air corrects. J’ai envie de les ajouter à ce dîner, me demandant pourquoi on les avait stockées debout.
J’essaie de les ouvrir et ce qui m’apparaît c’est que pour les deux vins, le bouchon était tombé dans le liquide. Je ne l'avais pas vu dans la cave sombre. Je n’ai besoin d’aucun tirebouchon. Tout indique que ces bouchons doivent flotter dans le vin depuis plus de quatre ans quand ils ont été placés là où ils sont, et ce qui est fascinant c’est qu’aucun des deux vins n’a un nez de bouchon.
Le
Mazy Chamberin Thomas Bassot 1945 a un nez très pur. La couleur est belle, non déviée. Le nez n’a pas l’ombre d’une trace de bouchon. Alors on le met en bouche et là, ça commence par une impression de glycérine, et ça finit par un fort goût de vinaigre. Ce qui est intéressant de noter c’est que ni le nez ni la couleur ne préfiguraient la déviation du goût.
Le
Griotte Chambertin Thomas Bassot 1947 a un nez plus incertain mais pas une seule évocation de bouchon. La couleur est encore plus belle que celle du 1945. En bouche ce qui est étonnant, c’est que c’est l’alcool qui domine au point que l’on a l’impression d’une grappa. Et comme l’alcool n’est pas net, il ne donne aucune envie de boire.
Ce qui est intéressant dans cette histoire, puisque aucun des deux vins n’est buvable, c’est que des bouteilles au bouchon tombé depuis plus de quatre ans n’ont aucun nez de bouchon. Que le vin soit mort n’est pas étonnant. Mais qu’il ait deux formes d’évolution où le bouchon est absent interpelle. C’est vraiment à méditer.
Fort heureusement les champagnes que j'ai ouverts ont comblé nos attentes, mais si je cite cette anecdote c'est que deux demi-bouteilles, de niveaux corects, ayant perdu leur bouchon depuis au moins quatre ans n'ont aucun défaut ni au nez ni en couleur. C'est étonnant.